B. LE CALENDRIER ET LA TRADITION DE L'ÉGLISE
(suite)
a. Introduction
Supposons que, jusqu'en 1924, l'Église orthodoxe n'ait pas pris position sur la question du calendrier. Alors, il serait possible d'accepter une discussion quelconque sur ce sujet. Toutefois, l'Église, bien qu'ayant pris connaissance des arguments de ses adversaires et étant au courant des lacunes astronomiques de son calendrier, refuse systématiquement une telle réforme.
Elle n'a pas simplement exprimé une opinion, ni laissé la question comme un «théologoumène», mais elle a pris une position nette, non seulement ayant interdit le calendrier papal, mais l'ayant anathémisé par ses conciles panorthodoxes. La conscience de l'Orthodoxie respecta et entérina ces anathèmes durant des siècles. Comment donc pourrions-nous sur un sujet déjà examiné par l'Église et classé, sans porter atteinte à sa vénérable Tradition ?
b. La condamnation du nouveau calendrier papal
L'innovateur même de 1924, l'Archevêque d'Athènes, Chrysostome Papadopoulos, avoue la triple condamnation du calendrier grégorien (Accus.calendr. examen page 9) :
«Jérémie II, en accord avec Sylvestre d'Alexandrie, en 1583, ensuite avec Sophronie de Jérusalem, en 1587, se prononça contre le calendrier grégorien et convoqua en 1593 le Grand concile local auquel participa également Mélétios Pighas d'Alexandrie.»
La sainte Écriture nous enseigne que David dut couper la tête de Goliath avec l'épée même du géant. Pour cela, nous avançons l'aveu de l'archevêque innovateur.
1. Première condamnation en 1583
Dans l'histoire ecclésiastique du métropolite d'Athènes Mgr Mélétios (Éditions d'Autriche, 1784 - chapitre 11, page 402) nous lisons :
«Concile de Jérusalem pour le nouveau calendrier. 9. Durant la patriarchie de ce même Jérémie, un concile des métropolites fut convoqué à Constantinople avec l'arrivée de Sylvestre d'Alexandrie en 1583 qui, ayant condamné le calendrier innové de Grégoire de Rome, ne l'a pas accepté à la suite de la demande des latins.»
D'après le code manuscrit du monastère russe Saint Pantéléimon au Mont Athos (Code No 772), nous prenons connaissance du sigillium de ce concile :
«Sigillium de l'encyclique patriarcale aux chrétiens orthodoxes de partout à ne pas accepter la nouvelle pascalie ou le calendrier du sanctoral innové, mais de rester à ce qui fut défini bien et une fois pour toutes par les saints 318 pères théophores du saint premier Concile oecuménique, avec épitimie et anathème.
Année du Dieu-Homme 1583.
Indictio 12. Novembre 20.
- Patriarche de Constantinople JÉRÉMIE II
- Patriarche d' Alexandrie SYLVESTRE
- Patriarche de Jérusalem SOPHRONIE
et les autres hiérarques du concile présents.»
2. Deuxième condamnation en 1587
Dans l'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE du Métropolite de Didymotichon, Mgr Philarète Vaphides (Édition de Constantinople, 1912, volume III., page 125), nous lisons confirmation de la condamnation de1583 et en plus :
«Également en 1587, fut convoqué un concile à Constantinople où, en présence de Jérémie II, Mélétios Pighas et Sophronie de Jérusalem, fut condamnée la correction du calendrier comme PÉRILLEUSE et pas nécessaire, mais plutôt comme cause de plusieurs dangers».
3. Troisième condamnation du calendrier en 1593.
Ce concile eut lieu en février 1593 dans la sainte Église de Notre-Dame-de-Paramythie. Dans son huitième canon, est prescrit ce qui suit au sujet de la réforme du calendrier :
«Au sujet du REJET du nouveau calendrier, à savoir l'innovation des latins pour Pâque, nous voulons que ce qui a été décrété par les pères au sujet de la sainte Pâque salvatrice reste inébranlable. Que tous ceux qui auraient osé transgressé les prescriptions concernant la sainte festivité de la Pâque salvatrice, soient excommuniés et en dehors de l'Église du Christ.
Patriarche de Constantinople JÉRÉMIE II
Patriarche d' Antioche JOACHIM
Patriarche de Jérusalem SOPHRONIE
Patriarche d' Alexandrie MÉLÉTIOS¨
D'après l'évêque de Diavlias Mgr Polycarpe (voir : LA RÉFORME DU CALENDRIER Athènes 1947., page 13) : « ... en 1583, fut convoqué à Constantinople un concile des Églises orthodoxes auquel participèrent les quatre patriarches et le procureur de Russie avec beaucoup d'autres hiérarques orthodoxes, représentants des Églises orthodoxes. Celui-ci répéta l'excommunication du très saint patriarche Jérémie II et lança une encyclique qui, entre autres, dit ceci :
«Celui qui ne suit pas les coutumes de l'Église comme les saints sept conciles oecuméniques ont bien décrété que nous observions la sainte Pâque et le MÉNOLOGE (Sanctoral) et veut suivre la nouvelle pascalie et le sanctoral des astronomes du pape; qui s'oppose à tout ceci et veut tout renverser et abolir, qu'il soit anathème et en dehors de l'Église du Christ et de l'assemblée des fidèles ...»
c. Rejet systématique du calendrier grégorien de la part de l'Église orthodoxe durant des siècles !
Le REFUS du calendrier grégorien constitue une tradition de l'Église durant des siècles que nous ne pouvons pas transgresser impunément. Sauf si nous acceptons que pendant tant de siècles de REFUS PERSISTANT et de REJET de cette malignité l'Église agissait par ignorance ou plutôt par esprit de réaction maladive.
1. De l'antiquité même, l'Église avait connaissance de l'imperfection du système du calendrier et, pour cela, elle a fixé un équinoxe conventionnel passant outre l'équinoxe astronomique.
2. En 1324, Nicéphore Grégoras détecta les anomalies du calendrier et soumit un rapport avec des propositions de réforme auxquelles aucune suite ne fut donnée.
3. En 1371, le moine Isaak et Matthieu Vlastaris approuvèrent le calendrier de Grégoras et le soutinrent mais l'Église ne montra pas d'intérêt.
4. A la veille de la prise de Constantinople, Georges Yemistos proposa de nouvelles réformes du calendrier qui furent également rejetées par l'Église.
5. En 1582, lettre du patriarche Jérémie II à l'Église orthodoxe de Pologne interdisant le nouveau calendrier sous peine d'excommunication.
6. En 1582, lettre du patriarche Jérémie II au doge de Venise où la question de la réforme du calendrier est considérée comme privée de sérieux : «enfantillages».
7. En 1583, premier concile panorthodoxe de Constantinople contre le calendrier papal.
8. En 1583, Mélétios Pighas s'adresse au cardinal Jules Antoine en lui précisant les lacunes du calendrier grégorien. Il écrit en même temps le Tome Alexandrin au sujet de la Pâque.
9. En 1584, lettre du Patriarche Jérémie II au pape de Rome contre l'acte arbitraire du calendrier latin.
10. En 1587, deuxième concile de Constantinople contre le nouveau calendrier.
11. En 1593, troisième concile de Constantinople contre le calendrier de l'Occident.
12. En 1671 le patriarche de Jérusalem Dosithée (au sujet «DES AZYMES» page 539) dit que : «par la Grâce du Christ, depuis le 1e concile jusqu'à maintenant la Pâque sacrée est célébrée le dimanche et toujours après la Pâque légale et nous n'avons connu aucune confusion jusqu'à ce jour pour être amenés à quelque correction. Car il fut bien défini par les saints pères et reste sans faute éternellement. Il est inacceptable que les astronomes actuels de l'ancienne Rome aient enlevé 13 jours du mois d'octobre. De plus, leur nouveau calendrier provoque beaucoup de confusion et cause du désordre.»
13. En 1827, le patriarche oecuménique Agathange refuse toute correction du calendrier orthodoxe dit «julien».
14. En 1895, le patriarche Anthime VII interdit toute discussion sur la question du calendrier.
15. En 1902, la grande Église du Christ rejette un projet de réforme du mathématicien Epaminondas Polydore.
16. En 1903 (28 février), opinion de l'Église russe : «... ce changement qui ébranle l'ordre établi et sanctifié par l'Église depuis toujours, aura des conséquences indubitables dans la vie de l'Église.»
17. En 1903 (5 juin), opinion de l'Église de Jérusalem : «Toute proposition de réforme concernant le calendrier en vigueur et surtout la préférence du grégorien sera au préjudice de l'Orthodoxie».
18. En 1903 (14 juillet) : « ... avec le calendrier julien est lié le calendrier de l'Église.»
19. En 1903, décision de l'Église roumaine : «Le saint Synode de la sainte Église autocéphale roumaine pense et propose de rester là où nous sommes aujourd'hui. Car il est impossible de vouloir penser au sujet d'un changement ou d'une réforme du calendrier julien avec lequel l'Église orthodoxe v i t depuis tant de siècles sans porter préjudice aux prescriptions canoniques. D'ailIeurs, il ne nous est pas permis de toucher même du doigt les décisions antiques qui constituent la gloire de notre Église !»
20. En 1904 (12 mai), opinion du patriarcat oecuménique : « ... il est bon et juste de garder la pascalie déjà précisée et entérinée par l' attitude constante de l'Église ... et il n'est permis de rien innover à ce sujet ... Du point de vue ecclésiastique, nous ne sommes nullement obligés de C H A N G E R de calendrier.»
21. En 1919, opinion de l'Église d'Hellade (voir Mgr Polycarpe de Diavlias, idem page 16) : «le changement du calendrier julien ne s'opposant pas à des raisons dogmatiques et sociales peut s'effectuer avec l'accord de toutes les autres Églises orthodoxes autocéphales. Surtout avec le patriarcat oecuménique auquel il serait nécessaire de remettre l'initiative d'une telle procédure sous la condition non d'adhérer au calendrier grégorien, mais la rédaction d'un nouveau calendrier plus exact scientifiquement et privé des lacunes des deux autres calendriers en vigueur, julien et grégorien.» Notez bien qu'un membre de ce comité, votant en faveur de cette position était aussi Chrysostome Papadopoulos alors archimandrite et professeur de théologie à l'université d'Athènes.
22. En 1924, opinion de l'Église d'Alexandrie : «Enreg. N° 28. Au patriarche Grégoire à Constantinople. A la suite du télégramme de votre Sainteté, notre saint Synode étant réuni, décida ce qui suit : Nous restons à nos décisions synodales antérieures et nous rejetons toute adjonction ou toute réforme du calendrier.
à suivre
Telle est l'origine des hérésies qui, souvent, se sont élevées et s'élèvent encore : tel esprit sans droiture n'observe pas la paix; la perfidie, amie de la discorde, ne s'attache plus à l'unité. Tout cela, le Seigneur le souffre et le permet, laissant à la liberté d'un chacun son libre choix ainsi se dégage pour éprouver nos coeurs et nos pensées critère de vérité, grâce auquel apparaît en pleine lumière la foi intacte des âmes sûres. Écoutons l'avertissement que l'Esprit saint nous donne par la bouche de l'Apôtre : «Il faut qu'il y ait des hérésies, afin qu'on reconnaisse ceux qui parmi vous sont vraiment sûrs». (1 Cor 2,19). C'est donc ainsi que le fidèles se font reconnaître, que les gens sans foi sont découverts; que dès ici-bas, avant même le jour du jugement, s'opère une discrimination entre les justes et les injustes et que la paille est séparée du froment …
C'est contre les gens de cette sorte que clame le Seigneur, c'est loin d'eux qu'Il retient et rappelle son peuple hésitant : «N'écoutez pas, dit-Il, les propos des pseudo-prophètes : les visions de leur coeur les trompent. Ils parlent, mais non par la Bouche du Seigneur. Ils disent à ceux qui rejettent la parole de Dieu : La paix sera sur vous et sur tous ceux qui marchent selon leur propre volonté. Et à quiconque marche selon la perversité de son coeur : les maux ne s'appesantiront pas sur toi». Je ne leur ai point parlé, et ils ont prophétisé spontanément. S'ils étaient demeurés attachés à mon Essence, et qu'ils eussent entendu mes paroles pour les enseigner à mon peuple, je les aurais détournés de leurs pensées mauvaises». (Jer 23,16-17,21-22). De nouveau, le Seigneur les désigne et les flétrit, quand Il dit : «Ils M'ont abandonné, Moi, la source d 'eau vive, pour se creuser des citernes sans solidité qui ne peuvent retenir l'eau». (Jer 2,13). Alors qu'il ne peut y avoir qu'un seul baptême, ils s'imaginent qu'ils baptisent ! Ils ont abandonné la source de vie, et ils promettent la grâce de l'eau vivifiante et salutaire ! Non, les gens n'y sont point lavés, - ils s'y souillent; ils ne s'y débarrassent pas de leurs péchés, ils les accumulent ! Ce n'est pas pour Dieu que cette nativité-là engendre des fils, c'est pour le diable ... Engendrés par le mensonge, ceux-ci ne recueillent pas les promesses de la vérité; procréés par l'incrédulité, ils perdent la grâce de la foi. Ils ne peuvent arriver à la récompense de paix, ceux qui, par leur fureur séditieuse, ont rompu la paix du Seigneur. ...
Ce fléau, ô mes frères très fidèles, remonte à des temps antérieurs; mais aujourd'hui ce mal funeste, désastreux, s'est aggravé; ]a perversité hérétique, le poison des schismes se développe, pullule, pour notre perte. Il fallait qu'il en fût ainsi vers la fin des temps, selon le préavis et la prédiction que l'Esprit saint fait entendre par la bouche de l'Apôtre: «Aux derniers jours, il viendra des temps difficiles. Car les hommes seront égoïstes, orgueilleux, gonflés d 'eux-mêmes, cupides, blasphémateurs, rebelles à leurs parents, ingrats, impies, sens affection, sans loyauté, délateurs, intempérants, cruels, n'aimant pas le bien, traîtres, insolents, enflés de vanités, amis des voluptés plus que de Dieu, affichant les dehors de la piété, mais en répudiant l'esprit. De ce nombre sont ceux qui s'insinuent dans les familles pour captiver des femmelettes chargées de
péchés, travaillées de désirs de toute sorte, qui toujours apprennent sans pouvoir arriver à la connaissance de la vérité. Pareils à Jannès et à Jambrès qui s'opposèrent à Moïse, de même ces hommes résistent à la vérité. Mais ils ne feront plus guère de progrès, car leur folie éclatera aux yeux de tous, comme celle de ces deux hommes-là». (2 Tim 3,1-9).
Toutes les prophéties s'accomplissent et, maintenant que la fin du siècle approche, se réalisent après l'épreuve simultanée des hommes et des temps. De plus en plus, par le redoublement de rage de l'Adversaire, l'erreur exerce sa duperie, la présomption gonfle les coeurs, la jalousie les enflamme, la cupidité les aveugle, l'impiété les déprave, l'orgueil les enfle, la discorde les exaspère, la colère les précipite.
Ne nous laissons pas troubler ni émouvoir par ce débordement impétueux de perfide; que notre foi soit fortifiée plutôt par la vérification des prophéties ..
saint Cyprien de Carthage
De l'Unité de l'Église catholique (§ 10,11,16)